Prix Seligmann contre le racisme - 2014
« En terre d’exil, le langage devenait manque. Il s’inscrivait dans l’impuissance et, pire, rabaissait au rang d’animal celui qui était incapable de le manier. Souane chercha et fouilla en lui, mais tout ce qu’il trouva fut un mot.
Un mot unique. Qu’il prononça à la turque, en roulant le r, sans se douter que ce simple mot, si un jour il était prononcé au nom de la nation, sans guérir les cicatrices, pourrait combler bien des abîmes. »
La langue. Arabe ou turque, française, allemande… toujours la première frontière. Les mots, sentinelles indifférentes, retiennent l’âme de Souane Gül au pays – la Terre Mère – tandis que son corps s’use à la tâche sur le sol des Fransawis, absorbé peu à peu par les ombres, les arbres et les brumes de la Haute-Marne.
L’armée des mots, ces soldats indisciplinés qui n’obéissent qu’à Zora, sa fille aînée, mots livrant bataille contre le père, la tradition, les racines.
Il était une fois, il n’était plus… l’histoire d’une famille, une famille venue de Turquie, bientôt une famille française…
Sema Kılıçkaya
Sema Kılıçkaya est née en 1968 en Turquie, à la frontière syrienne, dans un milieu à la fois arabophone et turcophone.
Arrivée en France à l’âge de quatre ans, elle apprend le français avant d’entreprendre des études de littérature et de
civilisation anglo-saxonnes. Un DEA sur l’immigration turque en Grande-Bretagne l’a amenée à s’interroger sur les questions d’identité et de langues. Agrégée d’anglais, elle est aujourd’hui enseignante et traductrice. Le Royaume
sans Racines est son deuxième roman.